Amérique Latine la belle. Paysages splendides et diversifiés, grandeur, culture. Si les photos ont parlées d'elles-mêmes pour montrer la nature et les constructions humaines, un écrit reste nécessaire pour vous transmettre ce que m'ont appris les échanges avec les locaux et certaines recherches. Attention, tout n'est pas rose, mais diversifié.
 Sans faire trop de généralités, cet article reflète mon ressenti sur les régions que j'ai visitées: Buenos-Aires, Nord Argentins, Bolivie et quelques sites du Pérou. 

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 Voyager en Amérique Latine c'est s'immerger dans un mélange indigéno-espagnol plus ou moins indépendantiste et profondément anti-américain. En Argentine, où la totalité des indigènes ont été massacrés, la population est de descendance européenne et accepte sans grand ressentiment l'histoire de son pays. "It's history, we killed those people but we can't change it". 
 En Bolivie, pays à descendance majoritairement indigène, une indignation est restée et une lutte silencieuse pour l'égalité continue. Le président actuel Evo Morales est le premier président indigène du pays après presque 200 ans d'indépendance du pays. Il a officialisé le drapeau indigène au même titre que le drapeau Bolivien, officialisé aussi les nombreux dialectes parlés dans le pays (Quechua,...) 
Tous ont un profond ressentiment anti-américain. Gentiment, ils nous (les touristes) appellent les "Gringos" venant de "Green, go" en référence à la couleur de l'uniforme militaire. Rarement mais douloureusement ils rappellent les années 1970 où PRESQUE TOUS les pays latino-américains ont été soumis à des dictatures et coup d'états sévères et sanglants (disparitions, emprisonnement politique...), et soupçonnent sérieusement le rôle des USA dans ce reversement. Effectivement, les dictateurs au pouvoir ont ensuite lancés des séries reformes pro-américaines comme la libéralisation des ressources minières et pétrolières, ensuite exploitées par des entreprises occidentale. Cela est-il liè ou non, le trafic de drogue a aussi augmenté. C'est un fait, certains coups d'État furent financés par le FMI, ce fut notamment le cas de l'Argentine (source: Wikipédia). 

 Voyager en Amérique Latine c'est aussi découvrir de nombreux, magnifiques et mystérieux édifices érigés par des populations anciennes. Un passage au-dessus des lignes de Nazca au Pérou, l'une des constructions humaines les plus mystérieuses au monde, vous laissera perplexe. Des lignes droites qui s'étendent sur plusieurs dizaines de km, des dessins d'animaux de 200m de long et de larges formes géométriques s'étendent sur presque 300km2 et se voient nettement du ciel. Dans quel but ses lignes de presque 2000ans sont-elles nées? Comment ont-elles été créées avec une telle précision ? Et comment perdurent-elles ? Une vue de près montre qu'un simple "balayage" des pierres ont permis ces dessins; or 2000 ans plus tard, ni le vent ni la pluie ne les ont effacées (région aride mais fortes pluies occasionnelles, "el niño"). 
Au Machu Picchu, c'est le style architectural Inca (XVe siècle) localisé au top de la vallée sacrée qui rend perplexe. Des pierres de plusieurs tonnes coupées avec précision (voir photos) et emboîtées sans mortier, résistant aux chocs sismiques. Alignement d'édifices par rapport à l'axe du solstice et du Nord magnétique. Une œuvre architecturale, scientifique et artistique en harmonie avec la nature et le cosmos. 
 Chez les Tiwanaku, un peuple pré -Inca localisé en Bolivie (0-500BC), c'est le transport de matière et d'humains ainsi que la maitrise d'œuvre qui reste incomprise. Leurs édifices (religieux et astronomiques) furent construits à partir de pierres non seulement énormes (poids: Tonne), mais provenant de 200km de loin. Comment les avaient-ils transportés sur une telle distance ? Comment les avaient-ils assemblées ? Et comment se fait-il qu'ils possédaient des poteries dont l'origine semble asiatique? 

 Parlant espagnol, ce voyage fut aussi l'occasion pour moi d'avoir des échanges avec la population locale. Dans les comedores en Bolivie, autours d'un maté ou d'un vino tinto en Argentine, dans les petites tiendas, avec la dueña del hostel, avec les voyageurs latins. C'est remarquer que les Argentins sont très bavards. C'est remarquer ce mélange culturel entre le sang colonial, d'influence purement espagnol, et le sang indigène, qui rappelle plus le rythme de vie asiatique. 

 Voyager en Amérique Latine c'est découvrir l'habitat d'altitude sur l'altiplano (2500m-4000m avec des sommets a 7000m), les feuilles de coca, la fraicheur du soir (-15C), l'agressivité du soleil, le manque d'oxygène en effort, les paysages montagneux et désertiques, les lamas. 

 Dans le Nord-ouest argentins, où beaucoup de locaux voyagent en stop, nous avons eu la chance de lifter un berger auto-stoppeur au milieu du désert. Celui-ci nous a expliqué qu'il garde une semaine sur deux son troupeau de lamas à 70km de chez lui, et effectue chaque semaine le trajet (aller ou retour) en stop. Le berger n'enferme pas ses lamas et durant la semaine off, les lamas sont livrés à eux-mêmes et se promènent à leur gré au milieu du désert montagneux. Lorsque le berger revient, il peut lui falloir presque 3 jours pour les retrouver à chaque fois...
Sur l'altiplano, les lamas sont indispensables aux populations: Ils fournissent la laine, la viande et le transportent les vivres. Ils y en a plein partout, et chaque berger reconnait son lama grâce aux petits pompons qu'il lui met sur les oreilles. Il faut enfin distinguer les lamas, domestiqués et de différentes couleurs, aux vicuñas farouches, qui sont plus fins et de couleurs orangée. Les vicuñas sont des espèces protégées et sauvages et leur laine est la plus chère. Tuer un vicuña en Bolivie: 5ans de prison. 

 Voyager ici c'est aussi faire connaissance avec un peuple révolutionnaire. A Buenos Aires, la plaza de mayo est le lieu de toutes les manifestations et de toutes les causes. Après un passé de dictature violente où les femmes protestèrent silencieusement sur cette même place pour le retour des prisonnier politiques, l'esprit de vigilance est resté dans le sang des Argentins. 
 En Bolivie, la moindre mesure capitaliste en défaveur des travailleurs révolte le pays entiers. Les grèves, qui ont déjà durée jusque 27jours, consistent à bloquer l'ensemble des routes et sont sans pitié. Des voyageurs peuvent rester bloquer plusieurs jours dans leur bus au milieu de nul part; les marchés peuvent être à court de produit frais; rien de n'infléchira les protestations jusqu'à la réponse du président Evo Morales. Etant française et suivant au même moment les protestations de nuit debout, j'ai été perplexe de remarquer qu'en Bolivie les manifestations peuvent être fortes sans violence, et sans nécessiter l'encadrement du peuple par une horde de policiers agressifs. 

 C'est rencontrer de nombreux voyageurs espagnols écœurés de l'Europe, des banques et de la crise profonde qui a touché tous leurs proches. Ils maudissent ces banques qui ont prêté trop facilement et aujourd'hui possèdent les biens de leurs familles. Ils maudissent aussi leur roi enrichi et rêvent de la révolution française: "They cut his head, tio !" 
C'est rencontrer de nombreux voyageurs Argentins ou Chiliens (les pays les plus riches et coloniaux) et se rendre compte qu'ils prennent leur temps (surtout les Argentins): finir ses études à 28ans, passer une journée entière à bavarder, dormir peu. 
 Clin d'œil à notre peuple, voyager en Amérique latine en été c'est aussi voir des français PARTOUT, et être fière de notre civilisation curieuse et ouverte. 

 Et bien sûr l'Amérique du Sud, et plus particulièrement Bolivie et Pérou, c'est l'énergie humaine typique des pays en voie de développement. Négociations, absence de rigueur, rire, colère, communication, contact humain, informations cachées, familiarité et bienveillance. C'est le fonctionnement excitant et joyeux de peuples qui fonctionnent grâce aux humains plus qu'aux machines, et j'adore. 

 Au final, découvrir le sud de l'Amérique Latine c'est ressentir un mélange atypique de d'amertume, rage révolutionnaire, beauté, authenticité et fascination, mêlé à un son latino-bimbo, épicurien, easy-going, le tout dans un cadre naturel magnifique.



Construction Inca du Machu Picchu